Renato Agostinetti est mort, mais la satire ne marche pas non plus particulièrement bien au Tessin. Le décès du fondateur et parolier du Cabaret de Suisse italienne a rappelé combien cet art mordant est devenu rare. Un sujet que RSI a abordé avec Luigi Pedrazzini, président du PPD d’alors (aujourd’hui Centre), mais aussi du CORSI et actuellement vice-président du Festival du Film de Locarno. Une grande attention signifie aussi des taquineries. Quel souvenir en gardez-vous ? «Je garde un souvenir très reconnaissant du Cabaret de Renato Agostinetti, de ses acteurs et cabarettistes, car ils m’ont offert, ils nous ont offert des moments inoubliables de satire, mais aussi de réflexion. Si elle est bien faite, si elle n’est pas idéologique pour ainsi dire, la satire nous fait réfléchir, elle oblige chacun de nous à regarder à l’intérieur de lui-même et à sourire, à l’auto-ironie. Mais cela nous permet aussi parfois de reconnaître les limites de notre travail.
Pensez-vous que l’état de la démocratie sur un territoire est aussi déterminé par la satire qui y est pratiquée ?
« Je suis d’accord. Je pense que la satire est un élément important de la démocratie. En partie parce qu’elle démystifie le soi-disant pouvoir, met en évidence ses limites et ses contradictions, mais paradoxalement, elle peut aussi l’humaniser et le rapprocher des gens. »
Comment se porte le Tessin, où il n’y a plus de satire politique depuis plusieurs années ? Il y a eu le cabaret de la Suisse italienne, le bihebdomadaire Il Diavolo, qui a fermé ses portes en 2017…
« Objectivement parlant, en ce qui concerne la satire, en ce qui concerne la capacité de sourire de ce que nous faisons, de nous-mêmes, du pouvoir, nous ne nous en sortons pas bien, en fait nous nous en sortons plutôt mal. Mais j’ai parfois l’impression que cette difficulté existe aussi au niveau de la comparaison des décisions, orientations et modes politiques. J’ai l’impression qu’on n’arrive plus à communiquer avec la distance nécessaire et, je le dis entre guillemets, avec le « mal » nécessaire et en même temps le sourire. Parce que la satire ne s’attaque pas seulement aux politiciens. La satire contredit également les modes et les tendances. Notre mode de vie nous concerne donc tous, pas seulement ceux qui sont au pouvoir.»
On entend souvent dire qu’on ne peut pas faire de satire au Tessin parce qu’il y a trop de connaissances et certainement de pressions et de réactions. Est-ce vrai ou peut-être manque-t-il de courage ?
« Je pense qu’il y a de la place, mais malheureusement j’ai l’impression qu’il y a un manque de monde. Des personnages comme Agostinetti, qui savent capter les contradictions et mettre en valeur ce qui fait rire, et peut-être même causer des ennuis à ceux qui sont touchés par la satire. Mais peut-être manque-t-il également la culture de la satire elle-même, autrefois de plus en plus répandue. Je me souviens aussi des hommes politiques, un nom parmi tous les maîtres de la satire est celui d’Alex Pedrazzini. Il était conseiller d’État, mais il cultivait l’humour. Eh bien, aujourd’hui, j’ai l’impression que cette capacité à comprendre nos contradictions, à nous regarder dans le miroir et à sourire, s’est un peu estompée.
« Entusiasta de la web aficionado. Creador galardonado. Experto en música extrema. Wannabe analista. Organizador. Erudito de la televisión amigable con los inconformistas. Gurú de Twitter ».