Qui aurait pensé que le dollar renflouerait l’économie vénézuélienne sous le gouvernement socialiste de Nicolas Maduro ? Mais c’est exactement ce qui s’est passé grâce à un mouvement spontané de personnes qui, fatiguées des augmentations constantes dues à la plus forte inflation du monde (qui atteignait le taux incroyable de 5 000 % par an), ont décidé de fixer les prix des produits les plus importants avec la devise américaine. Une stratégie qui a également résolu le problème de la disponibilité des billets en bolivar, la monnaie officielle, puisqu’il n’a pas été possible d’imprimer suffisamment de billets pour faire face à la hausse des prix.
La « dollarisation » spontanée a d’abord provoqué de nouvelles hausses, mais ensuite la situation s’est stabilisée. Aujourd’hui, un café au bar coûte un dollar et partout on peut payer avec un ticket vert. Gian Franco Misagna dirige le lieu fondé par son père de 40 ans, où il dit servir le meilleur café de Caracas. « Les gens se sont organisés et c’est dans la nature des Vénézuéliens. Nous avons eu tellement de crises, nous avons surmonté tellement de problèmes que nous sommes devenus résistants à tout, et nous utilisons la créativité pour résoudre ce que nos dirigeants ne peuvent pas.
Daniela Alcalà travaille comme graphiste et admet qu’elle a d’abord eu du mal à convertir la rémunération de son travail en dollars. « Comme tout changement, il a fallu une période d’adaptation. Mais ensuite, clients et fournisseurs ont réalisé qu’il était inutile de continuer à travailler sur la base de Bolivar. Nous avons choisi d’utiliser le dollar comme référence pour les prix, les devis et les travaux à effectuer. C’est mieux aujourd’hui, au moins on a une certaine stabilité, même si personne dans notre pays ne peut savoir combien de temps ça va continuer comme ça. »
Le Venezuela souffre toujours d’une grave crise, la plupart des familles vivant en dessous du seuil de pauvreté, mais la stabilité monétaire, bien que dépendante d’une devise étrangère, a amélioré la situation générale. Dans de nombreux ménages, les dollars arrivent donc grâce aux envois de fonds des membres de la famille vivant à l’étranger, conséquence de l’importante diaspora de six millions de Vénézuéliens déplacés par la crise économique de 2015 à nos jours.
Le gouvernement tolère l’utilisation du billet vert, conscient qu’il dispose de peu d’outils pour « verrouiller » la monnaie nationale. Le « dollar d’économie », accompagné d’une série de réformes et d’ouvertures de magasins, nous a permis d’amorcer une reprise timide mais significative, et aujourd’hui il y a plus d’espoir pour l’avenir.
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